Enheduanna fut le premier poète et écrivain connu de l'histoire
- Alaa Tamimi
- 4 avr.
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Enheduanna est une figure historique majeure, considérée comme la première poétesse et écrivaine connue de l’histoire. Ses écrits portent une profonde dimension religieuse et personnelle. Elle a vécu durant le règne du roi Sargon d’Akkad (environ 2334–2279 av. J.-C.), fondateur de l’Empire akkadien en Mésopotamie.
En 1927, une équipe de fouilles de la mission conjointe du British Museum et de l’Université de Pennsylvanie a découvert les ruines de la nécropole royale dans la ville d’Ur, qui renfermait de nombreux tombeaux royaux ainsi que des trésors précieux datant du milieu du troisième millénaire avant notre ère.
Lors de ces fouilles, plus de cinq mille tablettes littéraires mésopotamiennes ont été mises au jour. Parmi ces découvertes figurait un petit disque circulaire en albâtre, représentant la grande prêtresse Enheduanna, fille du roi Sargon. Elle y est représentée vêtue d’une longue robe et d’un voile couvrant sa tête, ses tresses tombant sur ses épaules. Le disque la montre tenant un sceptre, présidant un rituel religieux devant l’autel d’un dieu, offrant prières et cérémonies sacrées.
L’historienne de l’art Irene J. Winter de l’Université Harvard a décrit ce disque comme étant sculpté dans un albâtre semi-transparent, mesurant environ 25,6 cm de diamètre et 7,1 cm d’épaisseur.


Le disque montre la princesse Enheduanna s'avançant vers l'autel pour offrir des sacrifices.
Le texte inscrit sur le disque mentionne son nom sous la forme suivante :
"Enheduanna, épouse du dieu Nanna, fille de Sargon, roi du monde ; dans le temple de la déesse Inanna, elle a fait graver ce sceau comme offrande au dieu Anu."
Avec le disque, d'autres objets portant le nom de la prêtresse ont également été découverts, notamment des sceaux et des tablettes d'argile. Ce disque est actuellement conservé au Musée d’archéologie de l’Université de Pennsylvanie aux États-Unis.
Parmi les tablettes retrouvées figurait une tablette contenant des lignes préservées d’un long poème dans lequel elle déclare :
« Je suis Enheduanna… j’ai pris ma place dans la demeure du sanctuaire. J’étais la grande prêtresse. »
Ces mots sont considérés comme l’un des premiers exemples connus d’écriture autobiographique.
Avant cette découverte, le nom d’Enheduanna était totalement inconnu. Mais la mise au jour de ce disque et des tablettes a considérablement enrichi notre connaissance de l’histoire ancienne de l’Irak.
Dans la littérature mondiale, Enheduanna est reconnue comme la première auteure connue de l’histoire. Elle est l’auteure du plus ancien texte poétique écrit, et la première femme à avoir signé ses œuvres à une époque où les écrits littéraires étaient presque toujours anonymes.
Le chercheur William Wolfgang Hallo, spécialiste de la littérature assyrienne à l’Université de Yale, la décrivait comme le "Shakespeare de la littérature sumérienne". Elle a précédé l’Épopée de Gilgamesh de 800 ans, le poète grec Homère, auteur de l’Iliade et de l’Odyssée, de 11 siècles, et la poétesse grecque Sappho d’environ 1700 ans.
Enheduanna a su allier son statut de princesse, son rôle de grande prêtresse, et son génie poétique, faisant d’elle une figure exceptionnelle de l’histoire de l’Irak ancien. Ses écrits ont inspiré de nombreux chercheurs et auteurs à travers le monde, et ont été traduits en anglais et en allemand.
La professeure Roberta Binkley, spécialiste de littérature anglaise à l’Université du Tennessee, l’a qualifiée de voix forte et affirmée, que les femmes ont besoin d’entendre.
En son honneur, l’Union astronomique internationale a nommé en 2015 un cratère sur la planète Mercure "Enheduanna", parmi une sélection de 3500 noms proposés — un hommage à son apport littéraire et intellectuel.
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